Notre place financière, c'est nous tous

Les conditions fiscales et l’offre en termes d’emploi générées par notre place financière témoignent de l’importance de ce secteur pour notre pays.

Durant ces derniers mois, la crise sanitaire a eu un impact considérable. Il s’agit non seulement d’une catastrophe sanitaire, mais aussi d’une catastrophe économique.

Le Luxembourg a heureusement pu faire face à ce défi. Nous avons mis à disposition toutes les ressources dont le système de santé avait besoin pour traverser cette situation unique. De plus, toute une série de mesures ont été prises afin de soutenir nos entreprises et sauver nos emplois. La crise sanitaire nous coûtera près de 3 milliards d’euros cette année.

Nous avions les moyens de réagir parce que, durant de longues années, nous avons développé une économie solide, en grande partie stimulée par notre industrie financière.

Le Luxembourg a fait de ce secteur une véritable industrie qui suscite à la fois la critique et l’admiration. Il est vrai que la crise financière de 2008 a profondément terni l’image de l’industrie de la finance ; et ce, pas totalement à tort. Mais le rôle de cette industrie consiste à gérer nos économies et à financer nos projets d’entreprise. Nos banques, nos fonds et nos assurances remplissent ce rôle. Les banques l’ont à nouveau prouvé durant cette crise en prolongeant les crédits des entreprises. Après la tornade de l’année dernière, nos assurances n’ont laissé tomber personne et ont remboursé près de 65 millions d’euros aux victimes jusqu’à présent.

Notre place financière suscite toujours la critique en raison du secret bancaire ou encore de l’affaire LuxLeaks.

Or, notre industrie financière ne peut pas être réduite au secret bancaire et l’affaire LuxLeaks n’a aucun lien avec les activités de nos banques, nos assurances et nos fonds. Notre succès se perpétue dans un contexte complètement différent et ne peut donc être attribué à ces facteurs.

En effet, le Luxembourg est numéro 2 mondial derrière les USA dans le secteur des fonds, car nous étions en mesure de vendre des fonds dans toute l’Europe. Aujourd’hui, nous dépassons même les frontières de l’Europe et sommes présents dans plus de 70 pays dans le monde entier. En 2007, notre bourse fut la première à émettre un emprunt « vert » et est aujourd’hui le leader mondial en matière d’emprunts durables grâce à l’expérience acquise au fil des ans.  Lorsque les Britanniques ont décidé de sortir de l’UE en 2016, plus de 60 instituts financiers ont déplacé une partie de leurs activités de Londres à Luxembourg. Nous sommes donc, sans conteste, l’une des places financières les plus importantes d’Europe.

Nous représentons aujourd’hui une place financière européenne hautement spécialisée et nos compétences linguistiques et culturelles nous ont permis d’acquérir une certaine importance au niveau international. Plus les pays impliqués dans une opération sont nombreux, plus celle-ci est complexe en raison des lois, des administrations et des différentes langues. C’est là que réside notre point fort. Une institution préfère vendre un fonds dans plusieurs pays européens à partir du Luxembourg, car elle a la garantie, grâce à nos connaissances, que nous le ferons dans le respect des différentes réglementations en vigueur. Le Luxembourg joue aussi un rôle important dans les secteurs des banques privées et des assurances vie grâce à sa spécialisation basée sur des années d’expérience, et ce encore aujourd’hui, même sans secret bancaire et avantages fiscaux.

Ce succès est bénéfique pour l’État, et donc aussi pour nous tous.

Ces dix dernières années, la part de marché détenue par l’industrie financière est restée stable aux alentours de 30-31 %. Étant donné l’importante croissance économique de cette période, ce chiffre indique une croissance parallèle des secteurs financier et non financier. Quoi qu’il en soit, cela démontre également que le secteur financier reste le plus important de notre économie.

Selon une étude du Conseil économique et social sur l’exercice 2017, le secteur financier représenterait 71 % de l’impôt commercial communal. Il contribue donc énormément au financement des initiatives permettant d’améliorer la vie des citoyens, tels que les crèches, les piscines ou les terrains de football, entre autres.

Entre 2011 et 2018, la contribution de nos banques, nos assurances, nos fonds et nos consultants (avocats, auditeurs, comptables, etc.) aux recettes fiscales de l’État est passée de 3 à 4 milliards d’euros. Rien que la taxe d’abonnement imposée aux fonds rapporte à l’État près d’un milliard par an. Cette large contribution permet de couvrir les dépenses de l’État telles que les salaires des fonctionnaires ou les investissements dans le tram, nos routes ou encore notre système de sécurité sociale et de pensions.

Ce succès génère également de nombreux emplois.

La place financière peut parfois paraître un peu poussiéreuse : on a souvent l’image du vieux banquier en costume rayé avec un certain tour de taille et peut-être même un cigare en bouche. Or, la réalité est tout autre ; notre place financière se compose principalement de gens tels que vous et moi.

Notre place financière emploie près de 51 000 personnes, dont la moitié dans des banques, 31 % dans le secteur des fonds, 8 % dans les assurances et 11 % en tant que consultants (fiduciaires, avocats, etc.). Ces chiffres soulignent la grande diversité des différents secteurs de notre industrie financière. Mais chaque secteur offre également une grande variété d’opportunités professionnelles allant de postes d’économiste, juriste, comptable à des postes de chef cuisinier, chauffeur et agent de sécurité, en passant par des postes de secrétaire, personnel indispensable malgré la digitalisation. Avec la digitalisation, des métiers tels qu’informaticien ou autre, touchant de près ou de loin à la technologie (par ex. graphiste), prennent de plus en plus d’importance.

Même s’il arrive occasionnellement qu’une banque annonce un plan social, le nombre d’emplois générés par une autre institution financière au même moment n’en reste pas moins élevé. En effet, depuis la dernière crise financière, le nombre d’emplois au sein de notre place financière a augmenté de 2 % chaque année.

Le nombre d’emplois dans les banques n’a pas vraiment augmenté, mais il n’a pas baissé non plus, il est resté stable, ce qui n’est pas si mal comparé à d’autres places financières. Ce sont surtout les secteurs des fonds (+3 % par an) et des services de consultance (+7 %) qui ont affiché une croissance.

Non seulement notre industrie financière crée des emplois pour sa propre activité, mais elle contribue aussi à la création d’emplois dans d’autres secteurs. Un emploi créé dans l’industrie financière contribue à créer 1,4 emploi dans un autre secteur. Lorsque nous créons deux emplois dans le secteur des fonds ou des assurances, nous générons 3 emplois dans le secteur Horesca, p. ex. Par conséquent, en plus des 51 000 personnes employées directement par l’industrie financière, celle-ci génère 71 400 emplois dans d’autres secteurs.

Les conditions fiscales et les emplois générés par notre place financière témoignent de l’importance de ce secteur pour notre pays. Il s’agit du cœur et des poumons de notre économie, sur laquelle nous pourrons et devrons compter à l’avenir.

Lorsque notre place financière se porte bien, il en va de même pour le pays et sa population.

Nicolas Mackel
Directeur général de Luxembourg For Finance,
Agence de Développement de la Place Financière
(article tiré du LW du 12 septembre 2020)